Référendum d'Initiative Partagée : lettre ouverte de Willy Schraen aux Parlementaires
Le jeudi 2 juillet a été lancé le Référendum d'Initiative Partagée (RIP) pour les animaux en proposant aux citoyens 6 mesures. La chasse à courre ainsi que les chasses dites traditionnelles sont dans le collimateur de cette initiative. Willy Schraen, le président des chasseurs, a écrit ce jour aux parlementaires français.
Mesdames et Messieurs les Parlementaires,
Depuis quelques jours circule en France un appel à la signature sur le principe du Référendum d’Initiative Partagée (RIP). Bien que cette possibilité existe depuis déjà quelques temps dans notre Constitution, cette première tentative d’obtenir le soutien de 185 parlementaires et de 4,7 millions de signatures de citoyens français, s’inscrit comme une épée de « Damoclès » pour notre pays. Le sujet choisi n’est dans le fond que peu surprenant, puisqu’il s’agit de la très controversée condition animale. A travers cette dernière, c’est aussi tout ce qui touche à la consommation de viande et son économie majeure qui sont visés.
Les propositions sont au nombre de 6, et balaient à la fois l’animal sauvage et la chasse d’une part, comme l’animal d’élevage et son bien être d’autre part.
Pour l’animal sauvage, il s’agit de faire interdire le cirque et les chasses et pratiques dites « traditionnelles ». Ces dernières sont issues de la plus lointaine histoire de l’Humanité, elles regroupent un nombre de pratiques où l’usage des armes à feu n’est pas nécessaire. Elles sont avant tout le moyen trouvé par l’Homme depuis toujours pour survivre dans une nature hostile, mais furent aussi ce qui permit à nos ancêtres de réfléchir à la capture des animaux pour se nourrir et se vêtir. Ces chasses font aujourd’hui l’objet de contrôles très stricts, et bon nombre d’entre elles furent réformées récemment par vos soins.
Je ne détaillerai pas ici l’argumentaire qui justifie ces pratiques sélectives et respectueuses, mais je me tiens à votre disposition pour tout complément d’information. Quoi qu’il en soit, nous n’en sommes plus là, car dorénavant la volonté dans cette nouvelle démarche sera d’abolir l’ensemble de ces pratiques. Les femmes et les hommes ayant construit leur vie sur les valeurs cardinales du bon sens et de la transmission rurale, se retrouveraient dans une situation de déstabilisation sociale et passionnelle, qui ne peut conduire qu’à des réflexes de colère pour la survie légitime de leurs précieux héritages ancestraux. Ils sont nos indiens français, protégeons-les même s’ils ne vivent pas en Amazonie…
Mais l’animal sauvage n’est pas le seul sujet puisque les méthodes d’élevage des animaux, comme la destination finale de ceux-ci, sont au centre d’une demande générale de changement drastique des pratiques, ou d’une abrogation pure et simple de l’activité. Là encore, les éleveurs de France n’ont pas attendu les polémiques publiques pour tenter de moderniser leurs pratiques d’élevage, et pour que les animaux fassent l’objet d’un respect justifié dans leurs phases de développement en captivité.
Toutefois, si de telles propositions devaient s’inscrire un jour dans la loi, l’évidence d’une production animale importée à bas prix se substituerait immédiatement à la production de nos éleveurs français, qui seraient dans l’impossibilité de répondre à de nouvelles règles incompatibles avec la rentabilité de leur production sur une échelle mondiale.
Il est logique qu’au regard de la situation économique actuelle de notre pays, de nombreux français ne seraient pas en mesure de s’offrir le luxe d’accroître le coût de leurs dépenses alimentaires sur des fondamentaux idéologiques.
L’adage qui verrait la France à quatre repas de la révolution prendrait alors tout son sens.
Que dire aussi de cette volonté affichée d’imaginer que la recherche médicale ne puisse se faire avec l’utilisation des animaux. Même si cette pratique est controversée, elle permet à notre pays de posséder des unités de recherches performantes, reconnues mondialement pour leurs découvertes qui font sans cesse évoluer le combat contre la maladie. Ces pratiques sont déjà extrêmement contrôlées, et permettent aujourd’hui à de nombreuses personnes de vivre mieux, et de garder un espoir fort dans l’évolution de la médecine. De nombreux chercheurs reconnaissent l’importance de la recherche animale, et interdire celle-ci ne pourrait que fragiliser l’avenir des générations futures, dans un contexte viral actuel préoccupant. C’est d’ailleurs nier l’une des leçons tirées de la crise du Covid-19 avec la nécessaire relocalisation d’un certain nombre d’activités de recherche et de production dans le domaine de la santé.
Pour finir, je souhaite vous interpeller sur le fond de cette démarche qui se veut démocratique. Vous êtes des élus de la République, et c’est le peuple de France qui vous a donné la légitimité à réfléchir et œuvrer pour que nos pratiques et nos actions s’inscrivent dans l’évolution de la société qui est la nôtre. Le mandat politique se veut alors professionnel, pour éviter que les décisions soient prises sous la dictature de l’émotion, et que ne soient en aucun cas appliquées des décisions sans mesurer la portée globale de celles-ci.
Hier la convention citoyenne et demain le RIP, posent la question légitime de l’existence même de notre système parlementaire. Si dorénavant, une majorité devait porter atteinte directement à une minorité par un argumentaire émotionnel ciselé, ce sont les principes mêmes de la cohésion sociale de ce pays qui ne tarderaient pas à voler en éclats sous votre bienveillance. A ce petit jeu, nous serons tous un jour minoritaire des autres. Aujourd’hui l’élevage et la chasse, demain la religion, l’âge ou l’origine ethnique, représenteront autant de possibilités d’auto destruction programmée de notre République. D’ailleurs dans la périphérie directe des associations qui soutiennent cette action très médiatisée, se dissimulent de nombreux groupuscules connus pour la violence de leurs exactions contre les gens qui ne partagent pas leur façon de penser. Vous aurez sûrement aussi remarqué que certains soutiens financiers affichés ont des intérêts économiques importants dans des entreprises liées à la production de produits non carnés, destinés à un nouveau marché de consommation naissant.
Mesdames et Messieurs les parlementaires, il reste encore dans ce pays des gens heureux, qui ne sont pas jaloux des autres, et vivent sans convoitise et sans haine. Ils n’en sont pas moins à l’écoute de leur temps, et s’inscrivent, par leurs vies normales, dans une modernité sans cesse renouvelée. Ils sont peut-être plus souvent dans nos campagnes que dans nos villes, mais au nom de quel clivage idéologique ou géographique faudrait-il leur imposer de nouvelles contraintes sous prétexte de condition animale ? Beaucoup de gens désertent les isoloirs, et leur prouver que l’élu n’est plus le lien entre le peuple et la loi, finira par détruire définitivement l’espoir d’un avenir apaisé et meilleur.
Je sais que chacun a le droit d’avoir ses opinions, comme c’est votre droit légitime, mais je vous demande de bien mesurer toute la portée de soutenir ce RIP. Si nous devions aller jusqu’au référendum, qu’importe le résultat, il fragilisera avec certitude l’unité de ce pays, faisant mourir le peu d’espoir de liberté qui reste chez bon nombre de ruraux. La fracture sociale et économique fait parler beaucoup d’elle depuis de nombreuses années, mais la fracture idéologique et politique qui se prépare achèvera de semer les dernières graines de la tempête sociale qui nous attend tous. Nous pouvons encore tous vivre dans ce pays avec nos différences, mais avec tolérance et écoute.
Je vous demande solennellement de ne pas engager notre démocratie sur le chemin de la haine et de la violence d’où nous ne reviendrons jamais.
Veuillez agréer, Mesdames et Messieurs les Parlementaires, l’expression de ma considération la meilleure.
Le Président,
Willy SCHRAEN